Benjamin perronnet V5 - Flipbook - Page 43
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Jean-Baptiste Greuze
Tournus 1725-1805 Paris
Sainte Marie l’Egyptienne
Fusain, sanguine et lavis gris
48,8 x 37,4 cm.
Sainte Marie l’Egyptienne aurait vécu au
Ve siècle. Après s’être prostituée à Alexandrie,
elle se convertit sur le seuil du Saint-Sépulcre
à Jérusalem et se retire dans le désert de l’est
de la Palestine, où elle passe le reste de sa vie
dans la solitude. Plusieurs années après,
elle reçoit la communion d’un prêtre nommé
Zosime qui retourne la voir un an plus tard
et la trouve morte. Selon la tradition, il tente
en vain de l’enterrer jusqu’à ce qu’un lion
apparaisse et l’aide de ses gri昀昀es à creuser
la tombe.
A la 昀椀n de sa vie, Greuze représente le sujet
de Sainte Marie l’Egyptienne dans plusieurs
tableaux et dessins. Un tableau la représentant
les cheveux blonds et un lion à ses pieds passe
à la vente Duclos-Dufresnoy en 1795. Il est
aujourd’hui perdu. En 1800, l’artiste exécute
pour le compte de Lucien Bonaparte
(1775-1840), qui se serait pris de pitié
pour le peintre alors tombé dans la misère, une
version de ce tableau. Cette fois la sainte
a les cheveux bruns et le lion est derrière elle,
sur un promontoire. Le tableau est exposé au
salon de 1801 et est aujourd’hui conservé
au Chrysler Museum of Art de Norfolk1.
La composition du présent dessin est fort
proche de celle du tableau de Norfolk. La seule
di昀昀érence notable étant l’absence du lion
à l’arrière-plan. Un autre dessin, de dimensions
fort proches (48 x 38,8 cm.) et exécuté dans une
même technique, montre la même composition
que la présente feuille2. Les seules di昀昀érences
tiennent dans la chevelure, plutôt brune
ici plutôt blonde dans l’autre, dans le fond
moins travaillé sur la seconde feuille qui est
également d’aspect un peu moins achevé.
Leur proximité rend malaisée leur identi昀椀cation
1
. Cat. exp. Jean-Baptiste Greuze 1725-1805, Hartford et autres lieux, 1976-1977, n°113.
. Vente anonyme, Paris, Hôtel Drouot, 14 décembre 1990, lot 52.
3
. Cat. exp. Hommage à la galerie Cailleux, Paris, galerie Coatalem, 2015, pp. 96-97.
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avec les dessins de ce sujet passés dans des
ventes anciennes. Ainsi à la vente van Sitter
et autres des 3-5 mai 1839 昀椀gurait au lot 121,
un “Dessin estampé au crayon rouge et noir,
première pensée du tableau de la Madeleine,
exécuté de grandeur naturelle.” A la dispersion
de la belle collection formée par Narcisse
Révil du 29 mars au 2 avril 1842 était décrit
“La Madeleine: elle est nue, en prière dans une
grotte, et à genoux sur une natte, la tête dans
sa main gauche, et regardant dans un livre
ouvert placé au coin à droite. Dessin au crayon
noir et rouge, et lavé à l’encre de Chine. Haut.
51 cent., larg. 40 cent.” D’autres dessins pour
la même composition sont documentés. L’un
d’entre-eux, montrant seulement la tête de la
sainte, exécuté à la sanguine, pierre noire et
estompe, est récemment réapparu3. Ce dernier,
comme la présente feuille et celle passée en
vente en 1990, sont peut-être, plutôt que des
études préparatoires, des ricordi réalisés comme
des œuvres d’art à part entières et destinées
au commerce.
Le baron Boutard, dans le Journal des débats
du 5 janvier 1805 commentait ainsi le tableau:
“Le sujet du tableau de
la sainte-Marie-Egyptienne est le même
au fond que celui de la Magdelaine:
cependant comme cette sainte pénitente
est bien moins connue que
la Magdelaine, et qu’elle n’a pas comme
elle une physionomie de tradition,
le peintre pouvoit se livrer sans
contrainte à son imagination.
Greuze a usé de cette liberté pour
donner à sa sainte Marie un caractère
de dévotion douce et affectueuse qui
est bien plus touchant en lui-même, et
bien mieux du ressort de la peinture que