Catalogue 33 - Flipbook - Page 36
79 • DUBRAY (Jean-Paul) - Les Malheureuses. Suite de lithographies. Préface d’Henri Boutet. Paris, Éditions
de l’Œuvre d’art international, 1903 ; in-folio, 4 pp. de texte + 12 ff. de planches, en feuillets, sous
couverture titrée et illustrée de l’éditeur (la fragile couverture, dont ne subsistent que les plats aux
bordures cassées et avec petits manques, a été remontée sur une chemise de papier vert moderne).
1200 €
Rare suite de douze lithographies originales sur le thème du malheur, de la maladie, de la folie et de la mort. Elle est
constituée d’un sommaire illustré (un personnage affublé d’une faux présente les titres des images à suivre) et de onze
planches aux titres évocateurs : “Il n’est plus”, “Abandonnée”, “Égarée”, “Maladie”, “Poitrinaire”, “Pensée folle”,
“Feu la Mère, feu le Père”, “Elle s’est aventurée !”, “Aumône”, “Découragée !”, et “Agonie”. Il s’agit de l’une des
premières productions artistiques publiée de Jean-Paul Dubray, personnage méconnu au parcours très intéressant. Né à
Maubeuge en 1883, il meurt à Paris en 1940. Élève de Jean-Paul Laurens à l’Académie Julian, il entre - pour nourrir
sa petite famille, femme et fillette - dans une imprimerie et fera ses débuts comme “teneur de feuilles”. Il joue également
du piano et dirige un petit orchestre à la Gaîté-Montparnasse, théâtre de variétés, puis devint secrétaire du poète Laurent
Tailhade. Il collabora à la Revue musicale et au Courrier musical où il tint la rubrique des concerts. Fondateur de la
revue “La lithographie et le bois” en 1906, il fut également rédacteur en chef de la revue “Le livre et l’image”, et alterna
une carrière artistique à celle de critique. Dubray a raconté la genèse de l’album que nous présentons : “C’était en 1903.
J’avais vingt ans. Je résolus d’avoir recours à la lithographie - à la lithographie au pinceau - pour exprimer les mille
spectacles que la vie me fournissait ou ce que certaines lectures - Baudelaire, Nerval, entre autres - me permettaient de
composer. Ainsi, après plus de six mois d’études passées, jour et nuit, au Laboratoire de psychologie expérimentale de
Villejuif dont les portes, en dépit de tous règlements, me furent ouvertes grâce à l’obligeance des deux assistants, le Dr.
Vaschide et le neurologiste Raymond Meunier, disparus aujourd’hui, je pus réussir à graver quelques spécimens des
malheureux vésaniques avec lesquels je m’étais familiarisé (…). Ce recueil, certes, était appelé à ne même pas voir le
jour sans l’aide d’Octave Mirbeau, d’Antoine Bourdelle, de Camille de Sainte-Croix, qui pressèrent Francesco Zeppa, le
mouleur de Bourdelle. Celui-ci s’empressa de m’ouvrir les portes de la revue - l’Œuvre d’art international - qu’il avait
fondée en collaboration avec Marcel Clavié, dans le seul but de défendre et d’encourager les jeunes littérateurs et artistes
d’avant-garde. Il fut décidé que la Revue éditerait à ses frais, bien qu’elle ne possédât que peu d’argent, les dix planches
en question et que des études seraient publiées dans la presse au jour de leur parution. Ces articles signés de Mirbeau,
d’Octave Uzanne, de Gustave Kahn, Jules Guédy, Félix Fénéon (etc), suscitèrent dans le public une vive curiosité. (…) Si
le recueil suscita bien des colères, voire des haines qui sont encore loin d’être apaisées, il me valut aussi force encouragements
de la part de maîtres incontestés : Rodin, Carrière, Bourdelle, Aman-Jean, Odilon Redon, Bonnard, Raffaëlli, Joseph
Bernard, Schuffenecker, Steinlen…” (Galvaing, Jean Paul Dubray graveur, pp. 46-48). L’encrage des lithographies est
plus ou moins contrasté, comme pour l’exemplaire conservé au Musée Rodin. Signature de l’artiste et date sur la pierre, enhaut à gauche des planches. Bon état malgré le défaut signalé à la couverture et deux ou trois petites déchirures restaurées.
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