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... DERRIÈRE SE CACHE UNE HISTOIRE
Et vous savez quoi ? je n’ai pas appuyé sur le
déclencheur. Non, je n’ai pas laissé de trace de
ce moment. La plus belle des photographies
du désert ne peut pas décrire ce sentiment,
cette émotion que je ressens devant cette
immensité. Mais il me suffit de fermer les yeux
pour
revivre
cet
instant.
J’ai
préféré
photographier ce touareg solitaire qui doit
ressentir ce même sentiment de plénitude et
de peur, prendre en pleine face comme moi
que nous ne sommes qu’un grain de sable
dans cette immensité pas si désertique que
cela !
LE SILENCE
Il s’agit probablement du sentiment le plus fort
que j’ai pu ressentir au cours de mes voyages.
Écouter le silence, on m’en avait parlé. Jamais je
n’aurais imaginé que le silence pouvait être
tellement assourdissant, à en avoir mal aux
tympans. Les acouphènes résonnent dans ma
tête.
Comment photographier le silence ? Je voulais
toucher du doigt cette sensation que les
hommes du désert décrivent, un sentiment
d’humilité et de liberté. L’infiniment petit alors
que nous sommes au milieu de l’immensité ! En
binôme avec un pilote chevronné, je me suis
formée pendant 1 mois à la navigation pour
vivre cette aventure. Une carte IGN, un compas
et la peur au ventre de ne pas y arriver, voilà ce
qui m’accompagnera pendant 3 semaines dans
ma traversée du désert libyen.
Des paysages d’une beauté dépassant mon
imagination, cette immensité de l’erg du
Sahara. Le bivouac installé, j’ai sorti mon
appareil photo pour me souvenir à jamais de
l’un des plus beaux instants de ma vie. La magie
a opéré, la belle lumière du couchant est
apparue comme par enchantement. J’ai
savouré cet instant, je me suis remplie de cette
énergie que seule la nature sait nous donner.
Durant ce voyage, j’ai découvert les limites de
la photographie et repoussé les miennes. J’ai
ressenti une émotion que, pour une fois, je ne
savais pas traduire par une image et quelques
mots. Ils ne suffisaient pas à “dessiner” ce
sentiment. De retour de ce voyage, j’ai compris
que l’apprentissage de la photographie,
comme celui de la vie, n’avait pas de fin. Une
de mes certitudes est mise à mal, le langage
photographique a peut-être ses limites. Tant
que nous avons à apprendre, il y a un
enseignement à tirer de toute chose qui nous
tire vers le haut.
Je suis ressortie grandie de cette première
traversée du désert, et il y en aura bien
d’autres. Chaque année durant 5 ans, cette
immensité
m’appellera,
irrésistiblement.
D’autres images, d’autres histoires.
Malheureusement, le terrorisme et les risques
d’attaques et de kidnappings sont devenus
pour moi un frein à cette si belle opportunité
d’écouter le silence.
Un évènement incroyable se produisit à la fin
de cette traversée du désert. Je suis sortie du
pays, cachée par le consul de France dans la
valise diplomatique de l’ambassade à Tripoli
pour passer la frontière après avoir vécu un
drame, mais ça c’est une autre histoire.
TEXTE ET PHOTO - MARIE-ANGE PORTAL
01
REGARD DE PHOTOGRAPHE DIFFUSION
RdP - 7