Numéro 02 LexMag - Magazine - Page 9
Albert Naud et l'œuvre inachevée : "je suis avocat, un métier formidable, je veux dire terri昀椀ant"
Albert Naud • avocat • engagement • histoire • droits de la défense
Les défendre tous ! Quel avocat n’a pas entendu cet apophtegme un jour de la bouche d’un plus ancien de ses
Confrères ? Peu connaissent néanmoins ce qu’il traduit
de force et de douleur. Son auteur a trop vu mourir.
« Je suis avocat, un métier formidable, je veux dire terrifiant, avec des problèmes, des tortures la nuit qui rôde, des remords. Savez-vous que je serre
la main de l’assassin ? Mais, si vous saviez comme ils sont petits et faibles,
en face de l’énorme machine judiciaire, dressée pour les broyer (…) choisi
ou commis d’office, j’ai fait corps avec eux. Les défendre tous comme ils
sont, avec leurs bassesses, leurs nostalgies à jamais stériles, leurs étincelles divines et leurs terreurs dernières a été et reste mon devoir [1] ».
Albert Leopold Naud est né en Charente [2], à Saint-Amant-de-Graves, le
8 mai 1904. Issu d’un milieu modeste, de parents agriculteurs, il franchira
nombre d’obstacles avant de prendre conscience de sa mission : celle d’assister et de convaincre. Dans un premier temps, il s’oriente en e昀昀et vers la
carrière de l’enseignement. À cette fin, il entre à l’école normale d’instituteur de Ru昀昀ec [3]. Puis, il décide de monter à Paris. Il y occupe un poste de secrétaire administratif à la chambre syndicale des raffineurs de sucre. À la
fin des années 1920, il entre au journal L’écho de Paris dont il est le rédacteur
pendant quatre ans. Il commence une vie qui restera militante, fréquentant
le cours d’orateur du Centre de propagande des républicains nationaux [4].
Les affaires pénales donnaient un sens à son action,
les affaires civiles les moyens de gagner sa vie
Ayant obtenu dans le même temps une licence de lettres et une licence en
droit, il prête serment en 1931. Il entre au cabinet du radical-socialiste, Maître
César Campinchi. Il devient par la suite le collaborateur de Raymond Poincaré, jusqu’à sa mort, en 1934 [5]. C’est alors que commence ses interventions
dans des a昀昀aires pénales, lui qui restera, selon lui, à 90 %, un civiliste. Les affaires pénales donnaient un sens à son action, les a昀昀aires civiles les moyens
de gagner sa vie [6]. Militant national, il plaide en faveur de René Boquillon,
un déserteur de la Première Guerre mondiale. Il obtient du sursis [7]. Grâce à
son éloquence claire et persuasive, il est élu Premier secrétaire de la Conférence du stage en 1934-1935 [8]. Il intervient deux ans plus tard devant le
tribunal correctionnel pour Henri de Kerillis contre l’organe officiel des Soviets [9] et pour le colonel François de la Roque contre l’Action française [10].
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